Dans ce nouvel article-interview, je suis parti à la rencontre de l’auteur des magazines « Le Marteau & l’Enclume ». Vous allez voir que cet échange est rempli de pépites sur le Jeu de Rôle, les livres-jeux et la création d’univers imaginaires au sens large. 🎤
Mais avant d’attaquer l’interview à proprement parler, voici un présentation du parcours de notre interviewé :
Né en 1980, Benjamin Berget, dit « le Marteau », est diplômé d’un Master de philosophie de l’Université de Bourgogne. Auteur de « livres dont vous êtes le héros » sous le pseudonyme B. B. Wismerhill (L’épopée du Moine Guerrier et La geste du Chevalier Errant), il a participé à des magazines et ouvrages collectifs sur le jeu vidéo et la pop culture pour les éditions Pix’n Love, Geeks-Line et Omaké Books.
Il a également réalisé la biographie de l’un des pionniers en arcade (Yu Suzuki, le Maître de SEGA). Passionné par le rapport de force entre censure et liberté d’expression, il a écrit L’Histoire des jeux vidéo polémiques (deux volumes) et Pasolini Mort pour Salò [ou Les 120 journées de Sodome].
Pouvez-vous nous en dire plus sur votre série de magazines « Le Marteau & l’Enclume » ?
Je vais parler ici des magazines qui portent sur les « livres dont vous êtes le héros », car notre autre formule, qui traite de la pop culture des années 1980, est en pause.
Il s’agit d’un mook, un magazine au format livre avec des dessins et photos. Le premier numéro est consacré à la saga du Prêtre Jean, le second à la Quête du Graal, le troisième à la saga Sorcellerie, le quatrième à Loup Solitaire. 📚
Je salue au passage les critiques Aronaar et Gagadoth, qui ont fait un boulot de fou sur le numéro Loup Solitaire : 30 volumes testés, plus une preview du 31 !
C’est nouveau, vous proposez un magazine « papier » ?
Après avoir étudié attentivement les différentes options, une solution rassurante s’offre à nous en distribuant les magazines sur Amazon.
Proposer deux versions sur des supports très différents nous demande le double boulot de mise en page, mais grâce aux deux tarifs (5 euros le numéro numérique / 15 euros l’imprimé) nous avons élargi notre cercle de lecteurs. 👪
Quelle a été la genèse de ce projet ?
Tout est parti du magazine Retro Lazer, des éditions Omaké Books. Je leur ai proposé comme premier article un truc très fouillé sur les livres-jeux, mais le rédac’ chef m’a accordé dix pages, pas une de plus.
J’ai fait au mieux pour résumer mon propos, tout en me disant que c’était dommage que la moitié de mes recherches restent sur un disque dur. J’ai donc enrichi ce travail, et avec l’aide d’amis, c’est devenu un numéro du Marteau & L’Enclume. 🔨
Pourquoi vous focaliser sur les livres-jeux ?
J’ai pris conscience avec la mort de Joe Dever et d’autres piliers de cette époque qu’un travail « d’archéologie du livre-jeu » méritait d’être fait avant qu’ils ne disparaissent tous, et les souvenirs des circonstances de leurs créations avec.
Il faut savoir que j’étais en train de préparer une interview de Gildas Sagot quand j’ai appris sa mort : le choc total ! Mon projet de hors-série sur ses livres-jeux est donc resté à regret dans les cartons. Mais il ne faut pas désespérer : la possibilité de republication de ses livres est à l’étude et nous serons là pour fêter ça !
À qui s’adresse « Le Marteau & l’Enclume » ?
La part des critiques des livres-jeux est importante dans nos magazines, mais la part des interviews l’est tout autant. Nous sommes ainsi en mesure d’offrir aux jeunes lecteurs une porte d’entrée sur les années 1980, et aux plus vieux, un éclairage inédit sur cette époque avec des interviews exclusives.
Au cours de mes recherches, j’ai par exemple été le premier à pouvoir confirmer l’identité de l’auteur des livres-jeux Les Messagers du temps, écrit sous le pseudonyme James Campbell.
Pratiquez-vous aussi le Jeu de Rôle ? Si oui, quels sont vos JDR préférés ?
Mon tout premier Jeu de Rôle était l’encyclopédie des « Légendes des contrées oubliées », qui était dérivée des magnifiques BD de Thierry Ségur. J’avais une quinzaine d’années et je n’en menais pas large en tant que MJ face à deux joueurs qui prêtaient davantage l’oreille à Iron Maiden en fond sonore ! 🙃
Mais depuis que je suis papa, je dois dire que mes loisirs ont été aspirés dans un vortex temporel. J’aime jouer à la Wii avec mes enfants (oui, je l’ai gardé, ainsi que la Wii U pour émuler des consoles encore plus vieilles), mais je voudrais qu’ils grandissent…
Quels sont les points communs entre le JDR et les Livres Dont Vous êtes le Héros ?
Il y en a tellement que je vais plutôt partir de ce qui les différencie pour ne pas m’éparpiller. La différence fondamentale, c’est que le Jeu de Rôle est une activité sociale, alors que la découverte d’un livre-jeu est solitaire, avec comme MJ (Meneur de Jeu) l’auteur du livre.
Il existe des jeux de rôle jouables en « solo », alors comment les distinguer ?
Les livres-jeux sont dans leur grande majorité orientés pour un public adolescent, avec des règles accessibles et un souci pour les auteurs de garder la lecture fluide. 📖
La mécanique de jeu est beaucoup plus lourde dans les Jeux de Rôles, qui se destinent plutôt aux jeunes adultes aimant les jets de dés et la théâtralité (voir par exemple une partie chez Game of Rôles).
Enfin, les livres-jeux forment un tout : ils ne demandent pas aux joueurs d’investissement particulier comme écrire afin de prolonger les aventures dans l’univers des Jeux de Rôles.
Et pour les points communs ?
Je viens de citer quelques différences pour deux médiums qui communiquent depuis leurs débuts (les auteurs de livres-jeux étant nombreux à être aussi créateurs de Jeux de Rôles, et réciproquement). 🎲
L’autre point commun vient des artistes qui effectuaient les couvertures et dessins intérieurs : on retrouve les mêmes que ce soient dans les livres-jeux ou les Jeux de Rôles papier, les jeux vidéo sur Atari ST et Amiga, les comics, les affiches du cinéma d’horreur et de fantastique, les albums de métal…
Leur public était également restreint, c’était le noyau dur de ce qu’on appelle, faute de mieux, la « culture geek » de nos jours. 🤓
Cette « culture geek » était-elle considérée comme une sous-culture ?
En effet, mais l’adversité a été un excellent facteur de cohésion pour les lecteurs / joueurs de livres-jeux et de JDR. Il faut se souvenir que les années 1980 ont été particulièrement rudes, car une poignée de jeunes déséquilibrés avaient pété un plomb en Amérique et des associations parentales avaient tout collé sur le dos de nos loisirs favoris.
En France, les liens des joueurs se sont d’autant plus resserrés durant « l’affaire de la profanation du cimetière juif de Carpentras », où les rôlistes étaient accusés par les médias de faire des orgies sataniques…
Où peut-on se procurer un magazine Le Marteau & l’Enclume ?
Les versions imprimées sont sur Amazon :
Les versions numériques sont disponibles sur notre boutique :
https://marteauetenclume.blogspot.com/2019/08/la-boutique-du-marteau-et-lenclume.html
Un grand merci à Benjamin pour le partage de son expérience. Quel plaisir de papoter de livres-jeux, de JDR et de pop culture en sa compagnie. 😃
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À très vite !
Thibaut
