
Dans ce nouveau « Focus sur un jeu », je vais vous parler d’un Jeu de Rôle qui a le vent en poupe en ce moment : Fabula Ultima. Cela fait plus d’1 an que je l’ai pour tout vous dire. Mais vous me connaissez : j’aime d’abord sentir l’ambiance, puis décortiquer le matériel, le système, la proposition de jeu, et enfin vous dire à qui ça parlera.
Ici, on est sur un hommage assumé aux JRPG (les jeux vidéo de rôle japonais). Pensez Final Fantasy, Dragon Quest, Octopath Traveler… mais transposé à une table de jeu, avec des crayons et des fiches de personnages. 🎮
Le JDR Fabula Ultima est sorti il y a un peu plus d’un an et demi en France et s’est déjà fait un nom à l’international (depuis son Italie natale). La proposition est claire : faire vivre des aventures fantastiques, inspirantes, héroïques, avec cette dramaturgie propre aux JRPG où l’on se dépasse, où des choix moraux bouleversent des royaumes entiers. Cette ambiance-là, le jeu la retranscrit en papier… sans univers officiel imposé. Intrigant ? Oui. Prometteur ? Aussi. 🤓
Je précise que Fabula Ultima a décroché la médaille d’or des ENNIE Awards du meilleur jeu 2023. Un signe de la qualité de ce JDR. Même si les prix ne font pas tout, évidemment.
Un univers à co-créer : la session 0 comme tremplin pour jouer à Fabula Ultima 🗺️
Pas d’univers canonique ici. Contrairement à des Jeux de Rôles comme Warhammer ou Cyberpunk, Fabula Ultima propose un canevas vide que vous allez remplir (notamment pendant la session 0).
Le groupe de joueurs (MJ inclus) façonne le monde : villages, royaumes, géopolitique, tensions, grandes guerres d’hier, dangers d’aujourd’hui, peuples, mythes fondateurs… Tout est possible. Des tables de contenu vous aiguillent, mais l’ADN reste la co-construction.
Cette liberté n’est pas cosmétique : les PJ sont au centre des tensions. Ce ne sont pas des “ratiers de bas étage” (coucou Warhammer, que j’adore par ailleurs 😉).
On commence déjà en mode « statut héroïque », avec une capacité réelle d’influence sur l’histoire du monde.
High fantasy, natural fantasy, techno-fantasy : vous dosez la couleur, et les choix des joueurs auront des conséquences concrètes sur le bien, le mal… et des populations entières. Oui, l’aiguille du destin bouge à votre table. ✨
Conseil aux MJ : traitez la session 0 comme un atelier. Cartographiez 4-5 pôles dramatiques (un empire expansionniste, une guilde techno-magique ambiguë, un culte élémentaire, un bastion isolé avec des reliques d’une ancienne civilization, etc.), dessinez 2 conflits “chauds”, 2 secrets “froids”, et reliez chaque PJ à un enjeu public et un enjeu intime. Votre campagne sera tout de suite vivante.
Des inspirations assumées dans la vibe JRPG
Fabula Ultima émule les JRPG. Le clin d’oeil Final Fantasy est présent jusque dans le titre. Mais on pense aussi à Octopath Traveler (structure d’épisodes, identités fortes) et à Dragon Quest (énergie héroïque, bestiaire très typé). 💽
L’idée est de mixer toutes ces saveurs : high fantasy pour les grands mythes, natural fantasy pour le bucolique et l’exploration, techno-fantasy pour l’alliage magie/technologie (aérocargos, armes à feu alchimiques, golems à coeur runique…).
Le résultat à la table : des aventures épiques, des dilemmes moraux, des boss qui demandent de la ressource, et des personnages qui assument leurs destinées.

Matériel & direction artistique de Fabula Ultima : compact, coloré, soigné
Devant moi, j’ai deux objets :
-
Le Livre de Base (à 39 €) : format compact, tout en couleur, très illustré. On sent que l’éditeur a mis le paquet côté DA. La vibe JRPG transpire dans les pages, un peu comme dans le JDR Ryuutama (que j’ai déjà analysé et adoré).
-
Le livret « Appuyez sur START » (à 4,95 €) : un petit fascicule d’aventure séparé qui complète idéalement le livre de base.
Je vais y revenir, mais pour moi, les deux vont de pair.
La maquette est claire, le ton didactique : les livres adoptent une approche “tutoriel de jeu vidéo”. On a vraiment l’impression de suivre un onboarding pas à pas. C’est plutôt exemplaire pour le coup.📘
Remarque : à date, je n’ai pas mis la main sur l’écran du MJ, ni sur les autres livrets de la gamme (Atlas de High Fantasy, de Techno Fantasy, etc.).

Système de jeu : simple, généreux… mais parfois long en combat
Vous me connaissez : je ne fais pas des pavés concernant les règles. Retenez l’essentiel :
-
Des caractéristiques classiques (Intelligence, Volonté, Physique, etc.).
-
Des jets de dés assez simples et lisibles.
-
Beaucoup de points de vie, et donc des combats qui s’éternisent parfois (à l’image des “boss fights” de JRPG). C’est assumé et cohérent avec l’inspiration, mais c’est le point qui me parle le moins personnellement. Après, rien ne vous empêche d’ajuster.
-
Magie : très présente, éléments (feu, foudre, glace, chaos…), rituels, beaucoup de sorts et d’options.
-
Équipement : boucliers runiques, armes à feu, robes magiques de sage qui octroient de jolis bonus… On peut imaginer tous types d’objets.
-
Progression : système de niveaux. Vous débloquez des capacités “comme dans un jeu vidéo”. C’est lisible, motivant, satisfaisant.
Quelques idées de réglages maison à mettre en place (notamment pour vos premières parties) :
- Réduire légèrement les PV des adversaires “standards” pour fluidifier le rythme.
- Introduire des “phases” de boss (paliers, faiblesses élémentaires) pour dynamiser la dramaturgie.
- Donner des “break points” narratifs (événements à 50 % PV) afin de relancer l’intrigue pendant l’affrontement.
“Appuyez sur START” : le chapitre qui fait la différence dans le livre de base
Le Livre de Base pose les règles puis, très vite, arrive le chapitre 3 : Appuyez sur START (à ne pas confondre avec le livret séparé du même nom, sur lequel je reviens dans 2 min). C’est votre piste de décollage :
-
On définit l’univers ;
-
On crée les identités ;
-
On choisit les classes ;
-
On “habille” littéralement les personnages (oui, l’esthétique compte, JRPG oblige 👗).
Quelques classes qui donnent le ton : Arcaniste, Chimériste, Mentaliste, Anthropiste… Et, pour ma part, j’ai une tendresse pour le Roublard “classique” et la Sombrelame (qui apporte ce petit feeling Dark Souls que certains d’entre vous chercheront 😉).
Le spectre de construction est donc riche, lisible, et incite à créer des identités fortes, voire un brin « clichées ».
Aides au MJ : concevoir donjons & aventures (et improviser !)
Le livre de base Fabula Ultima propose aussi une section solide pour le meneur : comment créer des aventures, préparer (ou improviser) un donjon, quelles questions utiles se poser pour que la partie respire. 🎲
Cette partie améliore réellement vos « compétences » de MJ si vous la suivez comme un atelier.
Et le ton “tutoriel JV” se poursuit : exemples, check-lists, enchaînements concrets. On n’est pas dans de l’encyclopédique. On est dans un mode d’emploi pratico-pratique. 👍
Astuce aux MJ : avant la première session, demandez à chaque joueur un thème musical lié à son perso (OST JRPG). Utilisez ces “leitmotivs” en jeu : c’est une façon rapide et efficace d’ancrer l’émotion (en ajoutant une touche épique personnelle).
Bestiaire : un “Pokédex” de créatures hautes en couleur 🐀
Gros point positif : le bestiaire. Très complet, presque clé en main, il déborde de créatures, monstres, démons et bêtes.
Et, fidèle à la promesse JRPG, on est moins dans le “dark” sinistre que dans le malicieux ou l’iconique (un peu à l’image de Ryuutama, encore une fois).. Certaines entrées font vraiment penser à un Pokédex. Venant de ma part, c’est un compliment ! 😉
Mes chouchous (pour vous donner quelques exemples emblématiques) :
-
Le Garganturat : un rat gargantuesque (oui, il porte bien son nom)
-
Le Tranchenille : un énorme mille-pattes coiffé d’un casque métallique (imaginez le bruit sur la pierre)
-
Le soldat techno-magique : parfait pour un esthétique magitech bien léché
-
Et toute la famille des Élémentaires : feu, foudre, glace, chaos, etc.
Globalement, on affronte moins des humains que des créatures hautes en couleur, ce qui renforce la saveur aventureuse du jeu.
Petit plus : proposez à vos joueurs de nommer 1 ou 2 créatures locales pendant la session 0 et d’en esquisser une capacité signature. Ça pousse la co-création jusque dans le bestiaire.

Le livret d’aventure séparé : Appuyez sur START (4,95 €)
À ne pas confondre avec le titre du chapitre 3 du livre de base de Fabula Ultima (même expression).
Alors, à mon sens, c’est l’achat jumeau du Livre de Base. Pour moins de 5 €, vous obtenez une aventure pédagogique qui montre le style d’histoires à jouer, avec des personnages prétirés bien pensés. J’ai particulièrement aimé Edgar, l’Ingénieur et Lavigne Fallbright, la Sombrelame (évidemment).
L’intrigue est convenue (dans le bon sens : lisible et efficace). Elle pose l’ambiance sans ambiguïté. 📖
Sans vous spoiler : on commence à bord d’un petit dirigeable qui survole une forêt. L’univers est déjà assez établi, mais les joueurs auront l’occasion de le faire évoluer, et le meneur pourra ajouter des éléments à volonté. On y croise les conflits de l’empire voisin d’Elonia et la ville-décor du Cratère de Megito, étroitement liés aux prétirés, avec de vrais choix moraux.
Pour comprendre l’ambiance du JDR Fabula Ultima, je conseille vivement de prendre ce livret avec le livre de base.
Un JDR facile d’accès ?
Attention : parce que l’on co-construit, on pourrait croire que Fabula Ultima est facile à prendre en main pour tout le monde.
En pratique, c’est “ultra bac à sable” :
-
Simple à jouer une fois l’univers posé ;
-
Exigeant à maîtriser si vous n’êtes pas à l’aise avec l’improvisation et la co-écriture.
Ici, il y a moins de secrets de MJ tirant les ficelles dans l’ombre. La plupart des idées et rebondissement scénaristiques se discutent à table, si possible en amont. Si votre table adore participer à la mise en place, c’est parfait.
Mais si vos joueurs préfèrent “arriver et découvrir” sans participer à la construction de l’intrigue et de l’univers, prévenez-les : l’attitude attendue n’est pas la même.
Cela dit, pour une table plus “spectatrice”, lancez quand même « Appuyez sur START « en mode guidé : limitez la co-création à 2 ou 3 questions “pivot” et faites le reste en coulisse. Vous gardez l’esprit du jeu tout en sécurisant le démarrage. 🧭
Pour qui ? Mon ressenti & verdict 🎯
En résumé, je comprends très bien le succès de Fabula Ultima.
J’avoue que ce n’est pas mon type de jeu préféré (les combats un peu longs façon “boss JRPG”, ce n’est pas ce qui m’emballe le plus notamment…). Mais la proposition est solide, cohérente et généreuse.
-
Pour débuter ? Oui… à condition d’avoir un groupe motivé par la co-création. Si vos joueurs veulent bâtir le monde avec vous, c’est une entrée très stimulante dans le JDR.
-
Pour les amoureux de JRPG ? Foncez. Vous retrouverez les codes (progression par niveaux, magie élémentaire, boss, enjeux moraux, esthétique magitech) et toute la saveur qui va avec.
-
Pour les MJ qui aiment le « façonnage » d’univers (avec l’aide des joueurs), une impro structurée, des dilemmes épiques et une certaine dramaturgie musicale… c’est un terrain de jeu royal !
Au-delà de ça, Fabula Ultima est à mon avis une bonne « école du JDR » : en apprenant à co-construire, vous gagnez des réflexes valables partout (autres systèmes, autres univers).
Et si vous êtes déjà conquis par la vibe JRPG, eh bien… foncez : Fabula Ultima, c’est du tout bon. ✨
En bref (si vous hésitez encore)
-
+ Univers à co-créer en session 0, tables à l’appui, ambiance JRPG très lisible.
-
+ Livre de Base clair, tutoriel dans l’âme, bestiaire “Pokédex” super agréable.
-
+ Livret « Appuyez sur START » (4,95 €) : prétirés, petite aventure clé en main (avec des pistes pour la continuer), choix moraux. Parfait pour comprendre la philosophie du jeu.
-
± Combats pouvant s’étirer façon “boss” (cohérent, mais à ajuster si vous aimez un rythme plus soutenu et direct).
-
± Ultra bac à sable : demande une table partante pour co-écrire et partir d’une page vierge.
-
Et encore une fois : si la vibe JRPG vous parle bien, allez-y sans hésiter. 🙂
Thibaut